mardi 20 novembre 2012

Epilogue. France-Chine, kilomètre 12000 et des poussières.

Et puis il faut revenir.

Revenir et s'interdire de penser à son voyage, parce qu'il y a plus urgent, parce qu'il y a plus grave. S'interdire de rêver à ces douze mille kilomètres, à ces ailes dans le dos, à ces matins angoissés, à ces soirées souriantes, s'interdire de comparer le bonheur et l'insolence d'alors et l'épreuve d'aujourd'hui, parce que c'est la vie, que c'est ainsi, qu'il faut faire front et éviter tant bien que mal de se retourner.

Heureusement, quatorze mois, ça ne s'efface pas comme ça.
Et, de même que la vie ressurgit toujours, malicieuse, effrontée, aux moments les plus noirs, mon voyage a fini par me revenir, boomerang joyeux, coloré, odorant, et me signaler qu'il était quand même de mon devoir d'y mettre un point final.

Je rêvais d'une fin au bord de l'eau, je rêvais de voir le Yang-Tsé se jeter dans la Mer de Chine, et moi dans un retour plein de promesses.
Mon voyage s'est achevé sur le tarmac d'un aéroport chinois.
Mais qu'importe, lorsque le but, c'est le chemin....

J'étais partie pour beaucoup de bonnes raisons, et pour quelques mauvaises que je ne voulais pas m'avouer. Je voulais contenter mes jambes pleines de fourmis, et mon coeur un peu trop palpitant. Je voulais me créer une vie pleine de souvenirs. Je voulais voir, les yeux écarquillés, le monde et ceux qui l'habitent. Je voulais savoir de quoi j'étais faite. Et je voulais de cette vie nomade qui me faisait vibrer depuis si longtemps. Voilà pour les bonnes raisons.
Je voulais essayer d'arrêter un peu ce temps qui file trop vite. Je voulais me prouver que j'étais capable de réaliser quelques chose qui me semblait objectivement impossible. Et peut-être voulais-je aussi le prouver au reste du monde. Voilà pour les raisons moins avouables.

De mon premier coup de pédale plein de questions à mon arrivée en Chine, de l'épopée turque à l'angoisse indienne, du sourire de la Bavière à la nonchalance du Laos, mon voyage a dépassé toutes mes attentes. J'en reviens fière des obstacles franchis. Humble des renoncements, des découragements, de ces quelques épreuves trop dures pour moi. Fascinée par ce monde si complexe, si changeant, si frileux parfois, mais si bienveillant partout.
J'en reviens surtout éperdue de reconnaissance pour toutes ces mains qui m'ont poussées, kilomètres après kilomètres. Toutes ces portes qui se sont ouvertes, chaque soir, sans faillir. Et tous ces encouragements que vous m'avez prodigués ici, et qui m'ont portées comme jamais je n'aurais cru cela possible. Ce voyage aurait été fini depuis bien longtemps, s'il n'y avait pas eu tous vos commentaires, j'en suis convaincue. Merci infiniment.

Mon voyage se termine, et j'en reviens plus forte, et, parce que je connais mes faiblesses et mes limites, plus humble aussi. Prête à faire front, mais les bras ouverts.

Miracle, le temps avait réussi à filer moins vite. Mais les fourmis, elles, sont toujours là.

Tout reste à vivre.

14 commentaires:

  1. Oui la vie est plus forte que tout ! J'en suis convaincue plus que jamais.. Très bel épilogue, j'éspère que tu continuera de nous faire rêver.
    Pleins de bisous et de courage.
    A bientôt,
    Marion

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  2. Tu l'as fait, tu as donné du bonheur à bien des gens, ici ou là bas...Et c'est essentiel. Fière de toi. Comme si souvent. Katia

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  3. Chapeau Juliette !
    Ce que tu as réalisé et aussi comment tu l'as transmis (ta plume est un régal) : RESPECT. Odile

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  4. Ce soir j'ai redécouvert ce blog alors que j'en avais lu le premier article au tout début de ton aventure.
    Impossible d'arrêter ma lecture. Merci d'avoir partagé tous ces moments. Ce soir j'ai été tour à tour émerveillée, déçue, lasse, heureuse avec toi.
    J'envie ta force et ton courage, peut être un peu ta folie comme diraient certains turques!
    En finissant cet article, les larmes se sont mises à couler toutes seules sans que je m'en rende compte, tu as vraiment une belle façon d'écrire.
    Merci encore et bonne continuation :)
    *Anonyme émue*

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  5. J'en ai les larmes aux yeux. Merci!
    flore

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  6. Merci Juliette de nous avoir fait voyager.
    Oui, tout reste à vivre, et ce sera riche vu le début, personne n'en doute.
    ce petit sevrage de deux mois a permis un arrêt en douceur pour nous autres, lecteurs "mordus". Mais quand, même ça va manquer....
    bonne continuation et belles aventures dans cette vie.
    catherine

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  7. très belle écriture, très beau périple et quel épilogue, je ne trouve pas les mots !... j'admire vraiment cette force de vie qui semble être la tienne.
    bonne continuation à toi.
    et continue d'écrire et de vivre ce que tu as envie de vivre !

    Anne

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  8. Tout petit cycliste25 novembre 2012 à 19:23

    Tu es décidément une jeune femme étonnante et, désolé si ça heurte ton humilité vaillamment conquise au fil des kilomètres, assez exceptionnelle.

    Tu fais visiblement partie des gens que les épreuves rendent plus forts, et je ne vois rien qui pourrait t'empêcher de réaliser tes prochains projets, ici ou au bout du monde...

    Tiens-nous au courant, tu as constitué par ton voyage un genre de petite famille virtuelle qui aime bien avoir de tes nouvelles.

    Hervé

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  9. Juliette,
    Votre belle écriture nous a tenus en haleine depuis plus d'un an. Quelle leçon de courage et de persévérance vous nous avez donnée! Nous voilà rassurés : nous savons maintenant que vous allez continuer à tracer votre route dans ce limon qui donne la vie.
    Merci d'avoir partagé avec nous tant de sensations et d'émotions.

    Huguette, une admiratrice

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  10. Un épilogue bouleversant qui ponctue ton aventure de manière optimiste, en dépit de l'épreuve que tu traverses en ce moment.
    La manière dont tu as narré ton périple est simplement remarquable ; tu as vraiment su faire partager les différents états d'esprit qui t'ont habité et rendre tes émotions palpables, dans les bons comme dans les mauvais moments.
    Ce que tu as accomplit force le respect et l'admiration à bien des égards.

    Je souhaite de tout coeur que tu te porte bien ; on s'est pas croisés depuis des semaines et je m'inquiète...



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  11. Merci beaucoup d'avoir partagé ton aventure sur ce blog !

    Quel plaisir ce fut de découvrir de temps en temps un nouvel article, avec à chaque fois cette même description parfaite des pays, des gens, de tes sentiments, de tes choix... bref, de tout !

    Et puisque tu n'as pas pu aller au bout, j'espère que toutes ces expériences vécues lors de ce périple t'ont quelque peu consolé.

    Enfin, comme lu plus haut dans les commentaires, si jamais tu as encore des fourmis dans les jambes, préviens tes fidèles lecteurs pour qu'ils te suivent derrière leur écran !

    Merci encore.
    Paul

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  12. Que te dire Juliette qui n’ait déjà été dit ? Ne nous privons pas non plus de formuler des gentillesses, cela ravigote ceux à qui elles sont destinées comme ceux qui les expriment.
    Ton blog nous a tenus en haleine, nous a fait vibrer. Ton écriture nous a charmés, émerveillés. Petits cyclos-tandémistes-voyageurs, nous avons partagé avec toi les bonheurs qu’engendre le voyage à vélo, tremblé dans les épreuves difficiles.
    Cette fin de voyage est d’une tristesse accablante. Mais tu es jeune, la vie va t’offrir beaucoup de belles choses, tu sauras aller vers elles…
    Annie et Daniel de la Sarthe comme Huguette et Daniel (commentaire du 25 novembre).
    Notre fille Anne est cliente à la Carpinienne, c’est ainsi que nous avons eu connaissance de ton blog.

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  13. Que dire que mes prédécesseurs n'aient déjà dit, à part te dire Merci !! Merci de m'avoir fait rêver et voyager par procuration ; de m'avoir permis de lire ta plume et ta prose si belles qu'elles m'ont souvent émues aux larmes et si parfois j'ai eu des craintes pour ta sécurité et guetté avec quelque angoisse ton prochain billet, ton aventure humaine m'a aussi donné du courage pour mon quotidien !!! Ton épilogue est juste magnifique, même si la Vie t'a joué un de ses mauvais tours. Je pense que tu trouveras dans tes souvenires la force d'aller toujours de l'avant et comme d'autres ont pû le dire, c'est avec plaisir que je lirai de temps à autre de tes nouvelles.

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  14. Que de chemin parcouru depuis la "petite" Juliette qui demandait à Zellidja une bourse pour aller chez les paysans de Cuba ! Je ne sais plus pourquoi nous la lui avons donnée ... on dira simplement que nous avons eu de la chance ! Mais on ne cachera pas notre fierté de t'avoir aidé à faire un premier grand pas. Et puisque je suis en train de sélectionner les boursiers lorrains - qui seront toutes des boursières - je n'ai pu m'empêcher de revenir sur ton blog en espérant qu'il y aura peut-être dans le nombre des élues 2013 une nouvelle Juliette qui nous fera voyager, nous fera rêver, nous fera même pleurer parfois et dont la capacité d'écriture nous fera en redemander encore et encore ...

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